OSTEOPATHE CANIN


Entretien avec Pauline Mignot par France Yorel

Photos :  P Mignot/Elo & Matt

Pauline est passionnée par la nature, les animaux et l’équitation depuis son enfance.


C’est à quatorze ans qu’elle découvre l’agility avec son border collie Stan.


Elle se passionne  ensuite pour la compétition avec sa première shetland End Up Gold, puis avec sa seconde nommée Larke.  Sky, un border collie vient rejoindre le groupe.

 

Après quatre années d’études, Pauline devient ostéopathe équin et canin spécialisée en rééducation fonctionnelle , fitness canine et préparation physique du chien de sport.


Son parcours la mène à être l’ostéopathe de l’équipe de France d’agility en 2011, 2017 et 2019.


En 2012, elle ouvre  Horse Form ( centre de rééducation pour chevaux )

 

En 2017, elle crée  Dog Form (fitness trainer et cours en ligne)

 

Portrait d'une passionnée


Comment organisez-vous votre temps ?


Actuellement, suite à un changement de vie personnelle,  je n’ai plus de centre de rééducation pour chevaux ni de cabinet d’ostéopathie. J’ai repris pour un temps mon activité d’ostéopathe en itinérance, j’organise donc mes tournées par secteur géographique.


Je consacre aussi du temps à mes classes en ligne de travail postural et fitness canine, au suivi et bilan à distance de mes patients en rééducation ou en préparation physique sportive, à l’écriture ou à l’enseignement,  mais également à la mise à jour de mes connaissances, les journées sont donc bien chargées !


J’essaie également de consacrer du temps à la préparation de mes chiens et de moi-même selon un planning bien précis car ce sont de véritables athlètes, enfin en théorie, car le planning est souvent chamboulé .

Recevez-vous les chiens ou vous déplacez-vous sur les lieux des sports canins ?

 

La majorité du temps, je reçois des chiens à mon cabinet ou bien je me déplace à domicile mais je ne pratique pas sur les lieux de sports canins.


Les séances d’ostéopathie exigent un lieu calme pour la détente complète du chien et sont rarement, à l’inverse de la kinésithérapie, un « travail d’urgence ».


Cependant, quand les conditions le permettent et quand je suis en déplacement, il m’arrive d’intervenir dans un club canin ou plusieurs patients sont regroupés.


Enfin, pour mon plus grand plaisir, il m’est souvent arrivé de suivre des équipes nationales sur de grosses compétitions (championnats d’Europe et du Monde) pendant plusieurs jours.

 

Pourquoi l’ostéopathie animale, en particulier pour les chiens, prend-elle de l’ampleur ?

 

L’ostéopathie animale, et plus particulièrement canine, est en effet à la mode.  Les médias communiquent dessus, certains vétérinaires réfèrent leurs patients quand ils jugent cela nécessaire, les propriétaires de chiens font donc de plus en plus appel à nous.


Mais je crois surtout, qu’actuellement, les gens sont à la recherche de bien-être et de médecine alternative pour eux et ils appliquent cette même vision pour leurs compagnons.


Les propriétaires sont de plus en plus à l’écoute des besoins de leurs chiens et les maîtres pratiquant un sport, de plus en plus orientés sur la prévention.

 

L’ostéopathie, qu’est-ce que c’est exactement ?

 

L’ostéopathie, c’est avant tout pour moi, une vision globale du corps et une recherche permanente de la mobilité. C’est bien sûr une thérapie manuelle qui se base principalement sur le principe de l’homéostasie, soit la capacité du corps à s’autogérer. Un ostéopathe a plusieurs cordes à son arc, les techniques : structurelles, tissulaires, viscérales, cranio-sacrées.

Est-ce que l’ostéopathie animale est identique à l’humaine ?

 

Oui, à la différence que notre patient ne parle pas et n’est pas forcément aussi coopératif, d’où la différence de technique sur une même lésion, mais surtout l’importance de l’examen dynamique et de la collecte d’informations via le maître.


Enfin la posture et le fonctionnement global du quadrupède  par rapport au  bipède sont à l’origine de la majorité des différences anatomiques.


Est-ce que les chiens aiment ça ?

 

Je pense que oui dans la majorité des cas car ils finissent par s’allonger d’eux-mêmes, voire même s’assoupir. Parfois, certains de nos patients à quatre pattes nous reconnaissent joyeusement ou rentrent et montent eux-mêmes sur la table de consultation…

Cependant, comme chez nous, certaines manipulations ne sont pas forcément agréables.

Est-ce que les vétérinaires sont tous convaincus des bienfaits de l’ostéopathie ?


Oui de plus en plus, la réforme en France sur les ostéopathes non vétérinaires en est une preuve.

Les mentalités changent et en parallèle, les ostéopathes sont de mieux en mieux formés et connaissent également les limites et les contre-indications de l’ostéopathie, pouvant permettre ainsi un travail respectueux et en équipe aux services de nos patients.


L’ostéopathie n’est pas une médecine irrationnelle mais bien une science qui s’appuie sur l’anatomie, il reste encore des sceptiques mais cela avance dans le bon sens, et c’est tant mieux !

 

Combien de temps doit-on laisser entre les séances ?

 

Il n’y a pas d’intérêt, à l’inverse de la kinésithérapie ou des séances de massages, de programmer un grand nombre de séances à la suite ou dans le temps. Nous pouvons conseiller en fonction des besoins une à trois séances par an.

Parfois, nous  demandons à revoir nos patients pour une deuxième séance trois semaines environ après une séance.

 

Existe-t-il beaucoup d’ostéopathes canins ?

 

Oui le métier est « à la mode » et se développe, nous sommes donc de plus ne plus nombreux mais cela varie encore énormément en fonction des secteurs géographiques et il y a encore plus d’ostéopathes équins et animaliers que d’ostéopathes canins uniquement.

Qu’est-ce que le fitness trainer ?

 

La fitness canine, c’est un petit peu le yoga du chien.

Cette discipline associe travail postural et gainage.


L’entraîneur est là pour veiller aux bonnes postures, vérifier le matériel et l’enchaînement des exercices.


Il fait parfois un travail de kinésithérapeute, quand il est formé et que cela est nécessaire.

 

Pour qui ?

 

Elle s’applique aux chiens de sport pour les préparer, aux chiens en rééducation mais aussi aux chiens de compagnie qui souhaitent pratiquer une activité sportive non traumatisante, les chiens vieillissant, les chiens souffrant d’ankylose…


Bref, comme pour nous, un travail basique mais qui doit être encadré par quelqu’un de compétent capable d’adapter le travail.


Tous les chiens peuvent donc en bénéficier, les besoins sont parfois moindres mais il est important, comme pour nous, d’être suivi en préventif afin d’éviter des compensations qui peuvent se transformer en troubles locomoteurs ou fonctionnels et être à l’origine de dysfonctions ou pathologies secondaires.

 

Qu’est-ce que la phytothérapie canine ?

 

La phytothérapie c’est, avant tout, soigner par les plantes ou pour certains, la médecine du « moyen- âge ».

L’idée est de trouver le principe actif  dans les plantes pour nous soigner (bourgeons, feuilles…) et cela peut se présenter sous différentes formes : teinture, poudre, cachets…


Elle est souvent couplée à l’ostéopathie car elle s’inscrit dans la même démarche préventive.

Elle est donc souvent utilisée en cure de plusieurs semaines et les choix des principes actifs sont faits en fonction des besoins.

A titre personnel et professionnel, nous travaillons avec le laboratoire ELEMENT VET.

 

Comment préparez-vous un champion à une compétition ?

 

Préparer un chien à devenir un champion est un travail de longue haleine et de tous les instants mais qui passe avant tout par le respect de son compagnon, et ce, tout au long de sa vie.


Il faut d’abord le connaître, le préparer, l’éduquer, le muscler, « le dresser », l’entraîner pour optimiser au maximum son potentiel tout en le préservant sans  oublier  que c’est un chien avec des besoins et des désirs de chien.


La plus grosse erreur, à mon sens, est d’oublier ce dernier point et de ne  plus penser  qu’à la compétition.


La préparation à une compétition est, quant à elle, très planifiée. Il faut gérer le bon timing de l’entraînement, de la préparation physique, des soins, du trajet, des objectifs, du temps de repos, tout cela dépend des chiens mais pour performer,  cela doit être mûrement réfléchi et s’appliquer également au maître.


Un champion canin, c’est comme un sportif de haut niveau, j’utilise donc dans ma préparation des temps de massage et de repos, des exercices de posture et de stretching, des temps de marche, je fais attention à l’état d’hydratation, j’adapte les besoins énergétiques, je fais très attention aux conditions météo, je couvre le chien si nécessaire, j’évite les situations de stress et d’excitation et je fais également très attention à l’échauffement et la récupération.

 

Que vous apporte vos chiens dans la vie de tous les jours ?

 

Tout, je crois. Ce ne sont pas des chiens mais des compagnons de vie et de famille. Ils partagent notre quotidien avec mon compagnon et nous nous connaissons par cœur.

Il m’est impossible de vivre sans eux, même s’il m’arrive de trouver du plaisir à partir en vacances quelques jours sans eux.


J’apprécie également le fait d’en avoir « que trois » (le retraité, le chien actif et la relève), ce qui me permet avec mon rythme de vie de leur accorder du temps à chacun d’entre eux.

Bien sûr que j’adore pratiquer l’agility avec eux, mais ce que je préfère par-dessus tout, c’est partir en randonnées avec eux, profiter de beaux paysage ou d’un coucher de soleil et de beaux moments de liberté « seuls au monde ».

 


Photographie : Elo & Matt

Voyagez-vous beaucoup pour votre métier et votre sport ?

 

Oui et même pas assez à mon goût…


Cela est parfois fatigant, mais c’est très enrichissant et ça me permet de concilier ma passion du voyage, qui est hélas mise de côté avec ce rythme de vie parfois éreintant.


J’ai parcouru avec mes chiens quasiment toute l’Europe et j’ai de beaux souvenirs en tête.

 

 Si c’était à refaire ?

 

Je crois que je referais tout mais sûrement différemment.


C’est un métier usant et difficile mais tellement passionnant. Aujourd’hui, je manque de temps pour mener à bien tous mes projets professionnels mais j’aime cette stimulation permanente et la remise en question qu’apporte le travail avec le vivant.

Pour l’agility , ce n’est pas toujours facile et c’est une passion prenante, je n’ai pas toujours les moyens de mes ambitions.  Mais quelle saveur d’arriver à atteindre certains de ses objectifs, de

partager des moments uniques qui  seraient impossible à vivre « dans la vraie vie ». Quelle magie de partager tout cela avec son chien et de voir l’évolution du duo !

 

Qu’avez-vous envie d’ajouter ?

 

Le monde d’aujourd’hui manque cruellement de bienveillance et de respect au profit du business, travailler et pratiquer un sport avec les animaux nous ramène au quotidien, au fait que la nature est belle et a de jolies choses à nous offrir, à nous de savoir le voir et d’en prendre soin.


J’avais déjà pour nature l’empathie mais j’ai développé ce trait à l’extrême ces dernières années et encore plus au niveau des animaux, de n’importe quels animaux.  

J’ai eu grand plaisir à m’occuper et à soulager tous mes patients à quatre pattes et d’accompagner certains jusqu'à leur fin de vie et je crois qu’ils m’ont autant apporté que ce que je leur ai apporté.


C’est un métier passion, voire un mode de vie !



© CELSIUS Prod, SABAM2021